Partenariat avec le Mouvement des travailleur·se·s sans terre du Brésil
Associer la mobilisation des ressources AU renforcement de la solidarité internationale
Avec une superficie équivalente à celle des États-Unis continentaux et un passé colonial similaire, le Brésil connaît une concentration extrême de la propriété foncière et des inégalités sociales stupéfiantes qui vont de pair. À peine 1 % des propriétaires terrien·ne·s contrôle près de 50 % des terres dans les zones rurales du Brésil. Les déplacements internes provoqués par les entreprises agro-industrielles, minières et hydroélectriques ont généré une absence généralisée de terres dans le pays. L’héritage de la colonisation et de l’esclavage persiste, et de nombreuses familles autochtones, afrodescendantes et paysannes travaillent en tant que main d’œuvre agricole dans des plantations situées sur leurs propres terres ancestrales. Dans ce contexte, les réalisations du Movimento dos Trabalhadores Rurais Sem Terra (Mouvement des travailleur·se·s sans terre, MST) du Brésil sont tout simplement extraordinaires.
Le MST œuvre en faveur d’une réforme agraire populaire fondée sur la souveraineté alimentaire. L’une de ses principales stratégies consiste en l’occupation de terres à grande échelle par des personnes sans terre. Ces occupations visent les terres qui ne remplissent pas de fonction sociale, conformément à la Constitution brésilienne de 1988. Les occupant·e·s créent des campements en attendant que le Gouvernement leur délivre des titres de propriété. Ces campements sont très organisés et répondent à des besoins tels que la santé, l’éducation et la nourriture. Lorsque les droits fonciers sont acquis, une colonie est formée et les terres sont divisées en parcelles agricoles et en un village central doté d’une école et d’un espace de réunion communautaire.
Depuis sa création en 1984, le mouvement a organisé plus de 2 500 occupations de terres et a réussi à obtenir des terres pour plus de 370 000 familles sur 7 millions d’hectares – un territoire équivalent à la taille de l’Uruguay. En 2023, il y avait environ 900 campements regroupant 150 000 familles sans terre au Brésil, qui s’organisent pour obtenir la reconnaissance officielle de leurs droits fonciers collectifs. Au fil du temps, le MST a créé une grande variété d’entreprises gérées par des coopératives, notamment des exploitations agricoles, des usines de transformation, des unités d’assistance technique, des coopératives de crédit et bien d’autres encore, produisant une grande variété de produits et de services. Avec un modèle de production fondé sur l’agroécologie, une agriculture en phase avec les cycles naturels et sans produits agrochimiques de synthèse, le MST est actuellement le plus grand producteur de riz biologique d’Amérique latine.
Grassroots International et le MST ont entamé leur relation en 1998, alors que le Brésil devenait un foyer de résistance à la mondialisation néolibérale. Depuis lors, la relation s’est épanouie sur de multiples fronts, de l’extension de l’agroécologie à la défense des droits humains, en passant par la promotion des féminismes de base.
Le partenariat s’est avéré particulièrement vital lorsque le Brésil a été l’un des pays les plus durement touchés par la pandémie de Covid-19. Avec le soutien du fonds d’urgence de Grassroots International, la réponse multiforme du MST à la pandémie a consisté à transformer l’une de ses écoles d’agroécologie en hôpital de campagne, à activer son Collectif national de santé pour envoyer des cohortes d’agent·e·s de santé populaires dans les communautés, à distribuer plus d’un million de boîtes-repas et plus de six mille tonnes de nourriture, principalement aux citadin·e·s dans le besoin, et à plaider en faveur de l’accès aux vaccins, du rétablissement des services essentiels supprimés par le Gouvernement et d’une transformation plus approfondie du système.
En 2022, le gouvernement d’extrême droite de Jair Bolsonaro a cherché à lever un moratoire national sur les expulsions, menaçant un demi-million de Brésilien·ne·s de se retrouver sans abri. Le MST est à nouveau entré en action et a mobilisé une réponse populaire massive, amplifiée par Grassroots International et les Ami·e·s du MST par le biais d’une campagne de solidarité internationale. Grâce à une série d’actions, dont des milliers de lettres envoyées aux autorités brésiliennes, la campagne « Zéro expulsion » a connu un succès retentissant. Le travail de plaidoyer et de communication reste un domaine de partenariat en pleine expansion.